Nicoline, jeune photographe bretonne, part avec son amie Gwen pour un reportage au Mexique. Ce qui devait être un simple contrat se transforme en un voyage initiatique. Guidée par Estéban, un homme lié à une ancienne lignée maya, Nicoline découvre qu’elle est au centre d’une prophétie millénaire : celle de la sauvegarde de l’équilibre entre les mondes.
À travers ce roman, j’explore les ponts invisibles entre la vie terrestre et la vie spirituelle, entre la science et la foi, entre le visible et l’invisible. La jungle du Yucatán devient alors un miroir de l’âme : un lieu de transformation où les certitudes s’effacent pour laisser place à la connaissance intérieure.
C’est aussi une histoire d’amour, entre deux êtres unis au-delà du temps, et un hommage à ma mère, femme druidesse, qui m’a transmis cette sensibilité à l’invisible et à la nature.
La Prophétie est un roman de lumière, de renaissance et de foi en ce que nous portons de plus grand que nous-mêmes. C’est une invitation à regarder le monde autrement, à travers les yeux de l’âme.
Le second tome arrive bientôt…
Extrait de La Prophétie, le destin des élus (Éditions Encres Rouges 2025)
Lorsque Yuna enlaça son nouveau-né, un bonheur immense la submergea. Nicoline ne pesait guère plus qu’une plume. La touffe hirsute de cheveux cuivrés lui conférait un air de lutin. Blottie au creux des bras de sa mère, elle dormait sereinement.
Kylian, le grand druide, invoqua la prophétie et initia le rituel. La clairière s’étendait en bordure de la fontaine de jouvence, à quelques pas du légendaire Tombeau de Merlin. C’était un lieu ancien, marqué de l’empreinte du temps. Trois pierres solitaires subsistaient, vestiges d’une allée couverte qui jadis se dressait là. Cet endroit sacré était garni de roches votives, habilement empilées, répondant aux vœux griffonnés sur des papiers enroulés et insérés dans les fissures du tombeau.
La cérémonie du baptême, tout comme les autres rites d’initiation, avait lieu lors de la célébration de Beltaine, en mai. Le mot baptême résonnait dans cette célébration, éclaircissant les origines celtiques de ce rituel. Ce rite marquait le passage entre les saisons froides et chaudes, entre les ténèbres et la clarté, entre la mort symbolique et la résurrection spirituelle. C’était la fête du passage.
Les anciennes cérémonies d’isolement dans les dolmens avaient souvent lieu lors de cette nuit particulière. Dans des temps reculés, les nouveau-nés ayant vu le jour depuis la dernière fête de Beltaine, avant leur premier anniversaire, recevaient leur premier baptême. À sept ans, une nouvelle cérémonie se déroulait, au cours de laquelle ils s’engageaient sans le soutien des parents ni des parrains et des marraines. Puis, à quatorze ans, les jeunes hommes et filles connaissaient la véritable initiation guerrière, participant aux combats avec armes ou magie, dans lesquels ils excellaient. Cela ne se faisait plus de nos jours.
Le grand druide et le barde présidaient le baptême des tous petits, en présence des parents des enfants concernés. La clairière était entourée d’une foule en cercles joyeuse, chantante et bondissante. À l’approche du druide, le silence s’installa. Argan, le père de Nicoline, précéda Yuna. Sur le seuil de la clairière, il frappa le sol à plusieurs reprises, suivant un rythme immuable, invoquant l’autorisation des esprits à pénétrer dans ce lieu sacré. Le signal était donné. Le cercle intérieur suivit le père, reproduisant la cadence caractéristique. Les ondulations du premier anneau, constitué d’une trentaine de personnes, devenaient hypnotiques à mesure que le mouvement les traversait. La foule autour participait également à cette lente mélopée.
À ce moment-là, toute l’attention se porta sur l’enfant dans les bras de sa mère. Argan demeura immobile tandis que l’assemblée se concentrait sur la petite fille. Une fois que l’attention se fut portée sur l’enfant, le grand druide fit signe au père de s’approcher. Guidé par son troisième œil, le druide entrevit le barda de Nicoline, son karma. Il en déduisit immédiatement l’éducation appropriée. Les mains de Kylian effleurèrent le crâne de l’enfant, lui attribuant un nom secret. Il parla à voix basse, seule la lueur dans les yeux d’Argan témoigna de sa réception. Ce nom secret deviendrait le mantra du père, servant à son rôle d’initiateur. À vingt et un ans, l’enfant connaîtrait son nom secret, qu’elle porterait pour toujours.
Argan retrouva Yuna au seuil de la clairière. Ils se rendirent ensemble près du barde, chargé de recueillir l’état civil de l’enfant, ou plutôt, son état bardique. Le barde perçut les noms par l’oreille intérieure et les transposa en musique ! Il créa une composition musicale unique, servant de mantra personnel.
Le barde était le deuxième enseignant après le père et avant le grand druide. Comme un instituteur sacré, il aurait souvent l’occasion de faire résonner son mantra musical auprès de sa jeune élève. Chaque être possédait sa propre musique, véritable identité sacrée et acte de naissance magique. Le rôle de Yuna demeurait cependant le plus important. Elle devenait le lien indispensable entre tous. Elle devait orchestrer les enseignements que recevrait son enfant. C’est elle qui donnait le rythme à adopter pour l’éducation de sa fille, rien ne se ferait sans son accord préalable.
Autrefois réalisée dans un dolmen transformé en baignoire, comme celui de Ploumanach, la cérémonie se déroulait désormais dans les eaux de la fontaine de jouvence en Brocéliande, ainsi nommée, car elle était destinée aux enfants et aux esprits jeunes. L’ondoiement était l’initiation par l’eau, tandis que la musique personnelle était celle de l’air, et le rythme des pieds, annonciateur du rituel. Le feu intérieur trouvait son origine dans la lecture télépathique du barda, se traduisant par le nom secret ou sacré. Celle de la terre survenait ensuite sous l’allée couverte toute proche, nommée le Tombeau de Merlin. Ce nom était inexact, car Merlin sommeillait toujours, ensorcelé par la fée Viviane dans un sarcophage de cristal au fond du lac de Comper. La légende disait qu’il reviendrait quand le besoin s’en ferait sentir, une croyance qu’il fallait préserver.
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